S’offrir le temps de vivre
S’offrir le temps de vivre
Il y a une quinzaine d’années j’ai développé une discipline qui, déjà à cette époque, me faisait le plus grand bien. J’y avais recours chaque fois que je traversais une période de stress car, j’avais constaté à quel point cette discipline m’apaisait. Puis, au fil des années, j'ai eu l'idée d'y avoir recours plus souvent et même de la pratiquer chaque fois que cela m’était possible, y compris quand tout va bien.
Cette discipline consiste à s’offrir le temps de vivre ce qui va, vous en conviendrez, totalement à l’encontre du courant actuel où tout le monde s’active et court sans cesse !
NOTA J'ai appris depuis que cette discipline a un nom : la marche en pleine conscience !
Observez les gens autour de vous ! C’est une véritable course contre la montre ! Même une simple balade à la campagne devient une nouvelle occasion d’occuper utilement son temps… Marcher à une cadence soutenue, voire même courir, tout est bien orchestré pour se dépenser, brûler des calories, faire travailler ses muscles… Se coupant du monde extérieur, l’individu est tout entier concentré sur l’effort à fournir.
Et pourtant, il n’y a pas plus bénéfique pour le corps et l’esprit que de freiner volontairement sa cadence pour s’offrir une réelle promenade.
Marcher très lentement permet en effet de reprendre contact avec son corps et de se recentrer sur son vécu intérieur (sensations, émotions, respiration) tout en établissant un lien beaucoup plus étroit avec le monde environnant. Bref, se reconnecter pleinement avec son environnement tant intérieur qu’extérieur.
Quand on freine volontairement son rythme, le corps se délasse et les tensions s’apaisent peu à peu. La peau s’offre avec bonheur à la chaleur bienfaisante des rayons du soleil ; elle se fait aussi plus réceptive au souffle du vent. Notre esprit ne tarde pas à se mettre au diapason avec le reste du corps et, à son tour, lâche progressivement prise. Au bout de seulement quelques pas, les préoccupations du moment cèdent la place à la plénitude de l’instant. La détente, aussi bien du corps que de l’esprit, devient alors totale.
Quand on ralentit son pas, la Nature nous offre en retour de nombreuses occasions d'émerveillement. Il suffit juste d'apprendre à observer, écouter, sentir, ressentir.
Une multitude de petits détails se dévoilent à nos yeux : une fleur, un insecte, une pierre aux formes étranges, des feuilles aux coloris inhabituels, un nid d’oiseau dissimulé dans les joncs ou au sommet d’un arbre, … Mais aussi bien d’autres belles choses qui échappent à ceux qui, trop pressés, ne savent plus ni voir ni entendre. Déceler la présence discrète d’un oiseau dans les arbres, repérer au loin le tambourinement si caractéristique d’un pic épeiche, observer un insecte butinant une fleur, est un privilège accordé à ceux qui s'offrent le temps de vivre...
La promenade achevée, c’est donc l’esprit apaisé, le corps parfaitement reposé et les batteries bien rechargées que l’on revient à la maison pour reprendre le cours normal de ses occupations.
Au début, c’est vrai, il n’est pas facile de marcher lentement, surtout quand on a toujours marché très vite. Cela demande un effort sur soi surtout au début car, dès que l’on relâche l’attention, le pas reprend son rythme habituel ; mais, avec le temps, marcher lentement redevient naturel.
Cette manière de se déplacer n’est pas sans étonner et il n’est pas rare que je sois régulièrement interpellée par les personnes qui me dépassent et qui, se retournant vers moi, me lancent d’un ton mitigé : “oh lala, mais moi je ne pourrais pas marcher lentement comme vous ; ça me fatigue rien que de vous voir !” Avant d’ajouter en sautillant : ”Bon, je vous laisse et je continue car, si je m’arrête, je vais casser mon rythme.”.
Au début, quand on me disait cela, j’avais tendance à accélérer instinctivement le pas, histoire de me remettre inconsciemment en phase avec les autres mais, depuis, j’ai appris à respecter mon propre rythme et je continue tranquillement ma promenade. D’autres marchent plus vite que moi ? Et alors, où est le problème ?
(© Christine Coulon - 17 février 2016)
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Publié le mercredi 17 février 2016 par Christine